Les individus intelligents sont-ils plus sujets aux troubles mentaux et physiques ?8 min read

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La sensibilité accrue de votre cerveau peut vous rendre perceptif et créatif. Les chercheurs ont découvert que c’était une arme à double tranchant.


Rappel de cours 

QI, acronyme de Quotient Intellectuel, score dérivé d’un test psychométrique, dit d’intelligence, qui mesure les capacités cognitives (l’intelligence) d’une personne par rapport à son groupe d’âge. Les tests d’intelligence produisent des scores pour différents domaines par exemple, la maîtrise du langage, la pensée spatiale, etc. et un score global est calculé à partir des sous-tests.

Il existe environ 6 tests de QI mais les tests de QI les plus utilisés en France et dans le monde sont ceux de Wechsler, déclinés en plusieurs versions selon l’âge (WAIS pour les adultes de 16 ans et plus ; WISC pour les enfants de 6 à 16 ans ; et WPPSI pour les plus jeunes). D’autres tests existent tels que l’échelle de Cattell, le test de Binet-Simon et de Binet-Stanford ou encore celui de Raven (utilisé par l’armée). Le score moyen dans une population est de 100. La répartition des résultats correspond à la courbe statistique dite normale (en forme de cloche).
Via psychomedia.com

Le QI moyen se situe entre 90 et 110 précisément. Entre 111 et 120 : on parle d’intelligence supérieure à la moyenne. Entre 121 et 130, l’individu est dit « doué« . Et avec un QI supérieur à 130 : « surdoué« . De l’autre côté de la pyramide… entre 80 et 89, l’individu est considéré comme étant « en dessous de la moyenne« , et sous 70 il devient limite : on parle de débilité mentale.

Un livre pas nécessairement scientifique mais poignant et qui corrèle l’intelligence aux vraies valeurs humaines, celles dont on a besoin : Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes, c’est un 10/10 pour ma part. Citation de ce livre :

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« Mais j’ai appris que l’intelligence seule ne signifie pas grand-chose. Ici, dans cette Université, l’intelligence, l’instruction, le savoir sont tous devenus de grandes idoles. Mais je sais maintenant qu’il y a un détail que vous avez négligé: l’intelligence et l’instruction qui ne sont pas tempérées par une chaleur humaine ne valent pas cher. (…) L’intelligence est l’un des plus grands dons humains. Mais trop souvent, la recherche du savoir chasse la recherche de l’amour.(…) l’intelligence sans la capacité de donner et de recevoir une affection mène à l’écroulement mental et moral, à la névrose, et peut-être même à la psychose. Et je dis que l’esprit qui n’a d’autre fin qu’un intérêt et une absorption égoïstes en lui-même, à l’exclusion de toute relation humaine, ne peut aboutir qu’à la violence et à la douleur.« 

Mentale, La Santé, Cerveau, Psychologie, Tête, Esprit

 

QI & système immunitaire

Les personnes ayant un QI élevé (>121) sont considérées comme ayant un avantage dans de nombreux domaines. Ils devraient avoir un niveau d’instruction plus élevé, de meilleurs emplois et un  revenu plus élevé.

Pourtant, il s’avère (études) qu’un QI élevé est également associé à diverses maladies mentales et immunologiques telles que la dépression, le trouble bipolaire, l’anxiété, le TDAH ainsi que les allergies, l’asthme et les troubles immunitaires.


Pour quelle(s) raison(s) ?

Les chiffres

Dans un nouvel article publié dans la revue Intelligence, les auteurs de l’étude ont comparé les données recueillies auprès de 3 715 membres de l’American Mensa Society (personnes ayant obtenu la note parmi les 2% de tests les plus intelligents) aux données d’enquêtes nationales, afin d’examiner la prévalence de plusieurs troubles chez les personnes présentant une intelligence supérieure à la population moyenne. Les résultats ont montré que les personnes très intelligentes sont: ⚠️  Ce ne sont que des chiffres

  • 20% d’entre eux sont plus susceptibles d’être diagnostiqués avec un trouble du spectre autistique (TSA),
  • 80% sont plus susceptibles d’être diagnostiqués avec le TDAH,
  • 83% plus susceptibles d’être diagnostiquées avec anxiété
  • et 182% plus susceptibles de développer au moins un trouble de l’humeur.

En ce qui concerne les maladies physiologiques, les personnes ayant des capacités cognitives élevées sont:

  • 213% plus susceptibles d’avoir des allergies environnementales,
  • 108% plus susceptibles d’être asthmatiques
  • et 84% plus susceptibles d’avoir une maladie auto-immune.
 
 

L’explication scientifique

 

Pour rechercher des réponses et trouver une explication rationnelle à ces chiffres, les chercheurs se sont tournés vers le domaine de la psycho-neuro-immunologie (PNI). La PNI examine comment le stress chronique accumulé en réponse à des facteurs environnementaux influence la communication entre le cerveau et le système immunitaire. Les chercheurs soulignent que les personnes très intelligentes ont tendance à avoir des « surexcitabilités intellectuelles » et une hyper-réactivité du système nerveux central.

D’une part, cela donne aux personnes ayant un QI élevé une conscience accrue qui les aide dans leur travail créatif et artistique. Le domaine des capacités cognitives reconnaît qu’un aspect des personnes très intelligentes est « une capacité plus large et plus profonde à comprendre leur environnement ».

Cependant, cette hyper-réactivité peut également entraîner des dépressions plus profondes et une mauvaise santé mentale. Cela s’avère particulièrement vrai pour les poètes, les romanciers et les personnes à forte intelligence verbale. Leur réponse émotionnelle intense à l’environnement augmente les tendances à la rumination et à l’inquiétude : deux facteurs prédictifs de la dépression et des troubles anxieux. Par ailleurs, les réponses psychologiques accrues peuvent affecter l’immunité, d’après les chercheurs.

Enfin, les personnes présentant des excès de pouvoir peuvent avoir de fortes réactions à des stimuli externes apparemment inoffensifs, comme une étiquette de vêtement agaçante ou un son. Cette réaction peut se transformer en stress chronique de faible intensité et déclencher une réponse immunitaire inappropriée.

Lorsque le corps croit qu’il est en danger (que ce soit objectivement réel comme une toxine ou imaginé comme un son gênant), il lance une cascade de réponses physiologiques (cf cours de biologie cellulaire de paces) comprenant une myriade d’hormones, de neurotransmetteurs et de molécules de signalisation.

Lorsque ces processus sont activés de manière chronique, ils peuvent altérer le corps et le cerveau : ce qu’on appelle le vieillissement cellulaire, déréguler la fonction immunitaire et entraîner des conditions telles que l’asthme, les allergies et les maladies auto-immunes. La littérature scientifique a confirmé l’association entre enfants surdoués et l’augmentation du taux d’allergies et d’asthme.

 

 

Théorie de l’excitabilité hyper cerveau/hyper corps

Une étude (à prendre avec des pincettes en attendant que d’autres études confirment ces chiffres + ce n’est pas ce qui est intéressant ici..) montre que 44% des personnes ayant un QI supérieur à 160 ont souffert d’allergies, contre 20% des pairs du même âge. Sur la base de leurs découvertes et d’études antérieures, les chercheurs ont qualifié ce phénomène de théorie de l’intégration hyper cerveau / hyper corps, en expliquant que :

Les surexcitabilités spécifiques aux personnes très intelligentes peuvent exposer ces personnes à une hypersensibilité aux événements environnementaux internes et/ou externes. La rumination et l’inquiétude qui accompagnent cette prise de conscience accrue peuvent contribuer à un schéma chronique de réponses de combat, de fuite ou de gel qui déclenchent ensuite une cascade d’événements immunologiques. […] Idéalement, la régulation immunitaire est un équilibre optimal de la réponse pro- et anti-inflammatoire. Il devrait se concentrer sur l’inflammation avec force, puis revenir immédiatement à un état calme. Chez les personnes présentant les surexcitabilités évoquées précédemment, y compris chez les personnes atteintes de TSA (troubles du spectre autistique), ce système ne semble pas parvenir à un équilibre et les signaux inflammatoires créent donc un état d’activation chronique.

Les auteurs concluent qu’il est important d’étudier plus profondément la relation entre l’intelligence élevée (en particulier les 2% les plus intelligents, donc QI >130) et la maladie pour démontrer le lien de causalité et mieux mettre en lumière les aspects négatifs d’un QI élevé.

Comme ils le disent, « ce don peut soit être un catalyseur pour l’autonomisation et l’épanouissement personnel, soit un facteur prédictif de dérégulation et de débilitation » et, pour servir ce groupe, il est important « de reconnaître les grondements de tonnerre qui ont suivi le sillage de leur éclat. »

 

Mot de la fin

Il faut savoir que les études seules ne valent rien, il en faut plusieurs étalées dans le temps et qui arrivent à la même conclusion pour valider une corrélation mais  les éléments scientifiques apportés sont intéressants et on pourrait penser à une relation de cause à effet entre le niveau d’intelligence et la santé mentale. De mon point de vue personnel, le livre de Daniel Keyes vous le confirmera, plus on est intelligent et plus on va chercher à comprendre des choses à priori inutiles pour notre bien être ou traiter des stimuli qu’on n’a pas besoin de traiter. Une personne dénuée de raisonnement aura peut être moins de mal à appréhender le monde, la société et tous ses travers. Moins de mal implique moins de questions et donc moins de stress ; et l’effet négatif du stress (à haute échelle) sur la santé physique et mentale, lui, est bien connu.